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Séminaire

Séminaire des doctorants en phénoménologie de Paris 1 - Usages féministes de la phénoménologie

Cette deuxième séance du Séminaire des doctorants en phénoménologie de Paris 1 Panthéon-Sorbonne sera consacrée aux usages féministes de la phénoménologie.

Clara Chaffardon (Université de Bourgogne Franche-Comté) : Les réceptions féministes post-structuralistes de Merleau-Ponty : utilisations et critiques du concept phénoménologique de sujet

Alors même qu’on oppose d’ordinaire le post-structuralisme à la phénoménologie et à sa description de l'expérience subjective, mon intervention vise à explorer la réception complexe de Merleau-Ponty dans un ensemble de textes féministes où l’on repère une double filiation avec ces courants de pensée. Si un certain nombre de théoriciennes produisent, à partir de la phénoménologie, des analyses essentialistes et différentialistes du sujet femme, j’interrogerai la possibilité d’éviter ces écueils tout en conservant certains concepts et méthodes hérités de la phénoménologie. J’explorerai ainsi la manière dont Judith Butler pense la matérialisation des corps et l’inachèvement du sujet avec Merleau-Ponty, et subvertit la description phénoménologique à des fins de subjectivation. Plus généralement, j’expliquerai en quoi la réception de Merleau-Ponty par les féministes post-structuralistes fournit selon moi une alternative à la manière dont certaines féministes utilisent la Phénoménologie de la perception afin d'opérer un retour à la subjectivité féminine et au corps féminin.

Mickaëlle Provost (Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne) : Penser la vulnérabilité sociale au prisme de la phénoménologie critique.
L’objectif de cette présentation est de comprendre la vulnérabilité en tant qu’expérience vécue, depuis un angle d’analyse phénoménologique. La perspective phénoménologique envisage l’ambivalence de la vulnérabilité par la mise en question d’une définition qui en serait uniquement négative : la vulnérabilité serait une faille, une faiblesse ou un défaut. Au contraire, la vulnérabilité peut être envisagée comme une capacité à être affecté.e ou comme une exposition à ce qui n’est pas maîtrisé d’avance ou anticipé. Cette ambivalence de la vulnérabilité peut cependant être atrophiée en certaines situations politiques et sociales (sexistes, coloniales et racistes) donnant à la vulnérabilité une forme pathogène ou négative. L’enjeu est alors de de comprendre comment ces différentes dimensions de la vulnérabilité se mêlent au plan de l’expérience vécue, et la manière dont la vulnérabilité peut être travaillée, modifiée et orientée dans la perspective de pratiques émancipatrices. Pour comprendre ces différentes dimensions de la vulnérabilité, il importe d’articuler l’analyse phénoménologique à la critique sociale, afin de mettre au jour les exigences normatives et politiques qui apparaissent lorsqu’on porte attention aux expériences négatives de vulnérabilité. Je m’appuierai sur la phénoménologie de Maurice Merleau-Ponty, Simone de Beauvoir et Frantz Fanon pour élucider l’ambivalence de la vulnérabilité, et son ouverture à des transformations possibles. Cela me permettra de préciser ce que l’on peut entendre par « phénoménologie critique » et les déplacements conceptuels et théoriques d’une telle approche.